Hommage à Lucienne JUST

Lucienne JUST

Né le 26 aout 1923 à Firminy, décédée en service le 13 juin 1947.

Chevalier de la Légion d’honneur
Médaille aéronautique
Citation à l’Ordre de la Croix-Rouge française
Citation à l’Ordre de l’Aviation française

 

Lucienne fille de mineur, a choisi de faire ses études en médecine, brillante ses parents lui consacrent leurs ressources afin qu’elle puisse accomplir ses rêves.

  • En octobre 1942 elle entre en formation d’infirmière le 6 octobre 1944, elle obtient son diplôme d’État d’Infirmière à Saint-Étienne.
  • Elle s’engage dans l’armée de l’air. Elle entre en service le 1er septembre 1946 au sein des Formations Féminines de l’Air (FFA) elle sera affecté aux bases de Montluçon et de Clermont-Ferrand. Après 6 mois de formation interne, en juin 1946, elle est reçue au grade de convoyeuse de l’aire[1]. Elle est reçue au concours de l’IPSA : Infirmières Pilotes Secouristes de l’Air, où elle intègre alors l’effectif, alors composé de 10 assistantes sociales et 10 infirmières.
  • Entre aout et décembre 1946, Lucienne commence les vols entre l’Europe et l’Afrique, elle ne rêve que d’être déployée en Indochine, là où on a besoin d’elle. Elle fait de nombreuses liaisons aériennes.
  • Le 27 décembre 1946, le GMMTA (Groupement des Moyens Militaires de Transport Aérien) autorise le détachement de 6 convoyeuses de l’Air en Indochine[2]. Elles vont être emmenées sur zone eu moyen du Groupe 2/15 « Anjou » dans des avions de transport C-47 Dakota.
  • Lucienne Just se porte volontaire pour l’Indochine où elle réalise des missions de convois de passagers, matériels et surtout des extractions médiales. Une mission de tous les instants où elle effectue des tâches techniques, administratives et médicales. La plupart des ISPA sont des pilotes et pratiquent le saut en parachute. Elle frôle plusieurs fois la mort, attaquée par la DCA du nord Vietnam. Elle échappe à un attentat où sa camarade de vol sera blessée. Dans la nuit elle fait le trajet pour conduire sa sœur d’arme à l’hôpital distant de plusieurs kilomètres, dans un environnement inamical. Après plusieurs actes de bravoure au service des civils et militaires, elle périt dans le crash de l’appareil JU-52 du groupe « Béar », le 13 juin 1947. La commission d’enquête statuera les causes de l’accident par des erreurs de préparation de vol.

L’évacuation sanitaire est une nouvelle approche dans les opérations, conceptualisé depuis les années 1930 elle est mise en place en Indochine avec un matériel rustique, mais efficient. La France s’expérimente sur ce terrain et conceptualise une nouvelle doctrine d’emploi. Cette nouvelle branche appelée l’ÉVASAN émerge dans la prise en charge des blessées et voit l’arrivé de ses premières promotions dont en 1946 dont Lucienne fait partie. Rien qu’en Indochine, les ISPA ont rapatrié et soigné 46 743 blessés.

Photo d'illustration
Référence TONK 51-381 R1
© Auteur inconnu /ECPAD /Défense

Embarquement de blessés à bord d’un avion Douglas C-47B Skytrain à Lai Chau à destination d’Hanoï (1951)

 

La mairie de Firminy a souhaité honorer cette vie de dévouement, de service auprès d’autrui. La santé et la sécurité au service du collectif et de l’aide. Lucienne Just a été élevée à titre posthume au grade de chevalier de la Légion d’honneur. Il y a 73 ans la municipalité de Marcel Combe lui rendait hommage et l’accompagnait dans son dernier voyage.

Pour son centenaire nous nous souvenons de sa détermination et de son humanité qui l’on poussé jusqu’au sacrifice ultime.

 

Image d'illustration
Référence : HA 54-36 R24
© René Adrian ; Fernand Jentile / ECPAD / Défense
1954

Les IPSA (Infirmières, pilotes, parachutistes et secouristes de l’Air) sont venues nombreuses accueillir leur camarade
(24/05/1954)

 

Aujourd’hui, l’escadrille aérosaniatire 6.560 Etampes est l’unité descendante des convoyeuses de l’air de cette époque. Nous souhaitons les remercier pour leurs informations comme leurs engagements dans la défense et le secours de nos concitoyens.

 

 

Le contexte indochinois : comprendre les racines d’un conflit oublié aux conséquences géopolitiques mondiales

L’Indochine est un agrégat de provinces aux cultures et langues diverses. Elle est composée du Tonkin, le Laos, l’Annam, le Cambodge et la Cochinchine. Il y a une certaine homogénéité linguistique sur la partie vietnamienne (Cochinchine, Annam, Tonkin) avec un nord linguistiquement différent du sud.

La France s’intéresse dès la fin du XVIIIe siècle à cet espace principalement sous le biais de mission d’évangélisation et de commerce, c’est à cette époque qu’il prend le nom d’Indochine. Le 31 aout 1858 à l’issue de massacre de chrétiens et de ressortissant français par l’empire annamite[3] la France décide de forcer son ouverture au commerce. Va s’en suivre une conquête mal programmée qui va s’étaler sur près de 40 ans et jouer de très nombreuse alliance locale sous forme de protectorats.
La France va y déployer son administration et peu à peu les marchands vont stimuler le commerce du riz et de l’hévéa (un arbre qui permet la production du caoutchouc, ressource stratégique du XIXe siècle). Lors des réformes institutionnelles, un système bancaire est créé qui va largement profiter aux européens rompus au système capitaliste[4]. Un accaparement des terres va se réaliser et va créer une profonde rancœur parmi les différentes populations d’indochinoise. Couplé a ça les préjugé raciaux qui n’intègre pas les locaux, les théories léninistes vont infuser dans les années 1930 et vont trouver un fort soutien au futur Hồ Chí Minh[5].

En 1946, dans le sillage de la guerre civile chinoise (1946-1950), s’exporte en Indochine l’internationalisation des révolutions communistes. Les autorités françaises peinent à reprendre le territoire à la « Révolution d’aout », territoires, qu’elle s’est emparée sur les forces expéditionnaires japonaises défaites de l’été 1945 ; c’est le début de l’embrasement et de la poussée nationaliste « rouge » mener par Hồ Chí Minh. Son but est de renverser le colonisateur français et prendre en main le destin d’un peuple vietnamien. S’en suis une guerre longue et harassante dont la métropole se désintéresse. Soutenues par les Américains, les autorités militaires françaises tentent de mettre fin au « Việt Minh ». L’écrasant soutien logistique et humain les « volontaires » chinois va renverser peu à peu la guerre. L’armée française défaite militairement à Cao Bang et à Ðiện Biên Phủ, se défend avec acharnement dans un baroud d’honneur, vaincu elle n’a plus les capacités opérationnelles de se maintenir en Indochine. Un compromis politique de partition sera trouvé avec le Việt Minh entre le nord et le sud Vietnam.

Le conflit d’Indochine se solde par les accords de Genève de 1955 qui partitionnent le pays en deux États indépendants, au 17e parallèle avec une Zone Démilitarisée selon le modèle conclue par la trêve de la terrible guerre de Corée (1950-1953). C’est une paix provisoire dont les signataires n’ont pu trouver aucune meilleure solution diplomatique étant gelée militairement. La France évacue ses ressortissants et ses troupes. Les anciens protectorats du sud du Vietnam deviennent de fait indépendant[6]. Relativement inquiet ces derniers cherchent un nouvel allié pour résister aux appétits du Nord Vietnam, ils se trouveront sous le parapluie américain déterminer à contenir l’expansion du monde communiste.

 

À l’issue des 3 conflits majeurs de la guerre froide : la guerre civile chinoise, la guerre de Corée, la guerre d’Indochine puis du Vietnam redessine l’espace asiatique parcouru de tension et dont la sphère du communisme asiatique ressort globalement vainqueur. Encore actuellement, Taiwan (gouvernement de la Chine pro libérale de 1949) et la Corée composent des éléments de crispation.

 

 

La dimension du conflit :

Le conflit indochinois a été meurtrier, dans une France saignée et fragilisée par la Deuxième Guerre mondiale. 560 000 pertes sont enregistrées pour l’Union française (administration française de l’ensemble des provinces composant l’Indochine) dont une écrasante majorité de sud-vietnamiens, 20.000 soldats français perdront la vie. Près d’un million de nord vietnamiens, chinois et laotiens tomberont. Par comparaison, la traumatique guerre du Vietnam a couté la vie à presque 60.000 américains.

Les accords de Genève seront bafoués par le Việt Minh et qui s’imposera comme seule force politique présente avec la destruction politique et militaire du sud Vietnam (exilé en Californie jusqu’en 2013). L’unité du Vietnam communiste se fera au prix d’un des conflits les plus meurtriers de la guerre froide, le funeste duo de guerre Indochine-Vietnam.
La suprématie de la victoire nord-vietnamienne et l’épuration des partisans du Sud Vietnam est acté en 1975. L’indépendance du Vietnam a pris 28 ans, on estime qu’elle a coûté la vie de 2 à 5 millions de personnes uniquement dans les conséquences directes des deux conflits.

 

 

La mémoire d’une guerre oubliée

 

Il résulte de la confrontation politique et armée des deux mondes : libéraux et communistes.

Le conflit indochinois est un conflit qui a duré plus de 7 ans entre des entités politiques et culturelles mouvantes et qui fait entrer le monde dans une phase « chaude » de la guerre froide. Elle va participer au démantèlement de la France comme puissance coloniale. À peine 10 jours après les accords de Genève du 10 juillet 1954 qui reconnaissent l’indépendant du Laos, du Vietnam et du Cambodge, Pierre Mendès France reconnait l’autonomie de la Tunisie. Le processus de décolonisation est en marche.

 

Ainsi la guerre d’Indochine, qui sonne comme une défaite française, la perte de son empire colonial et de sa projection en Asie du Sud-Est. De l’autre côté de l’océan Indien, c’est l’affirmation du futur État-nation vietnamien au prix d’une terrible guerre civile.

À ne pas si méprendre, l’Indochine est une guerre cruelle, lieu d’âpres combats de guérilla et d’engagement de moyenne intensité. Préjugés raciaux, haine nationaliste, crimes de guerre et actes de barbarie ont été utilisés par les deux belligérants. Prêt de 75% des dizaines de milliers de prisonniers français trouverons la mort dans les camps de concentration et de rééducation du Nord Vietnam. On peut saluer les efforts, notamment, du général Jean-Étienne Valluy (un Ripagérien) qui a œuvré pour la fin de la torture par les services de renseignements français.

Le conflit a longtemps été passé sous silence ; dont souvent, seul le milieu militaire s’en est soucié. Depuis quelques années le monde politique reparle de ce conflit.

Durant la guerre d’Indochine, le grand public ne s’est pas intéressé, jugé lointain, colonial et souvent incompris dans une société politiquement divisée. De plus, il a été longtemps un synonyme de défaite et d’une humiliation que l’on préfère occulter. Très vite été superposé par un engagement militaire d’encore plus grande envergure celle de la guerre du Vietnam. Et en France une deuxième guerre de décolonisation qui va embrasser la mémoire du pays, la guerre d’Algérie.

 

 

 

 

[1] Grade assimilé aux aspirants, un grade intermédiaire qui fait la passerelle entre les sous-officiers et les officiers. C’est un Lieutenant en devenir.

[2] Le 19 décembre 1946 après des mois de tension, un coup de force a lieu pour renverser l’administration française sur place. Pris par surprise, dans une série d’attaques et d’attentats les forces françaises parviennent à repousser le Việt Minh qui prend le maquis. Le 21 décembre Hồ Chí Minh proclame le soulèvement général. La révolution indochinoise éclate.

[3] Les états composant l’Indochine sont extrêmement morcelés et mouvants entre le XVIIIe et le XIXe siècle. Ces nombreux états sont en crise et se font des guerres de successions.

[4] Il est estimé en 1937 que les européen a grande majorité des Français sont environ 42.000 sur une population de 23 millions d’indochinois 17 millions sont Vietnamien de plusieurs ethnies 3,6 millions de Cambodgiens, 1 millions de Laotiens et différentes ethnies mineurs. On estime qu’au début du XXe siècle environ 0,20% de la population a accès a presque 50% des terres du pays.

L’Annam et ses population est à 90% rurale, les européen eux son concentré dans les grande villes marchandes, comme Saigon.

[5] Des réformes émergent dès les années 1920 pour intégrer plus les populations dans la gouvernance et la captation des richesses du pays. Mais ces réformes freinées par des intérêts sont trop timides et n’ont pas assez d’effet. Les idéaux communistes infusent lentement mais surement le nord du pays, qui a une frontière avec la Chine et qui a plus souffert de la crise économique des années 1930. Et dont la libéralisation de la liberté d’expression a participé aux montages rapides de structures syndicale communiste dans le pays.

[6] La France met sur le trône un dernier empereur avant de partir Bao Dai.

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